De l’incessant défilé des acheteurs du domaine et de sa batisse, sont ici distingués ceux à qui l’amour des arts a inspiré les embellissements successifs.
Du manoir d’origine, on ne connaît aucune illustration ni description.
–Anne de Pisseleu, duchesse d’Etampes, fait construire vers 1540 le nouveau château dans les goûts de la Renaissance. A partir des restes du manoir médiéval, c’est-à-dire les deux tours rondes encadrant le corps, le rectangle s’étend maintenant vers l’est autour d’une cour intérieure. Les deux angles orientaux sont renforcés de tours carrées qui s’équilibrent esthétiquement avec les premières tours.
gravure de C. Chastillon : Limours château de moderne contruction au pays de Hurepois
La façade fait alors 11 mètres 50 de haut pour 50 mètres d’envergure. Les façades latérales, nord et sud, s’étendent sur plus de 70 mètres de longueur. Le vocabulaire architectural est typiquement celui que l’on peut observer sur les châteaux de François Ier : toitures effilées, lignes de refend, grandes fenêtres à meneaux, ornementations riches des Salamandres et des monogrammes « F » honorant le roi.
Des douves cernent le château (voir le plan).
–Diane de Poitier souhaite aménager une grande salle de bal en hauteur, 27 mètres par 10, au niveau des combles. Elle fait appel au célèbre Philibert de l’Orme qui a déjà réalisé pour elle le château d’Anet.
Celui-ci est en effet détenteur d’une technique personnelle étonnante pour réaliser des charpentes qui dégagent plus de volume, plus légères, et pour le tiers du prix des charpentes traditionnelles. Cette « nouvelle invention pour bien bastir et à petits frais » (titre d’une d’une publication de 1561) dite des combles en planches assemblées offre une forme en anse de panier.
–Le cardinal de Richelieu « craint le bruit des villes et cherche le silence et la solitude des champs ». Eh oui, déjà en 1623… A cette date il achète Limours et entend en faire un lieu de villégiature, de séjours de chasses pour le couple royal, mais aussi de réceptions.
L’investissement est à la hauteur : il fait réaliser une galerie de portraits royaux dans la salle de bal, avec force boiseries ornementales (Jean de Gonfreville). La chambre du roi est « enrichie d’or avec cartouches de relief dorés, à fond d’azur et blanc, et les frises toutes de relief, avec consoles, cartouches et le dessous des poutres tout de relief avec festons dorés à fond d’azur et blanc ». La chambre de Marie de Médicis est faite d’un même luxe.
En extérieur le fronton de la façade est décoré d’une fresque, et les jardins à la française sont parsemés d’antiques de marbres et de pièces d’eau mises en scène par le célèbre Salomon de Caus.
C’est alors que le château de Limours jouit de sa plus grande réputation.
Le domaine est un vaste carré étendu jusqu’à Forges et Roussigny
Gaston d’Orléans réalise des solutions pour apporter l’eau qui manque tant au château pour la fontainerie du parc. En 1638 il demande à l’architecte François Mansart de concevoir un aqueduc pour y apporter les eaux de Chaumusson. Il sera bâti par le maître maçon de Limours Charles Terelot.
Pour le domaine il fait aménager le pont sur la Prédecelle et le pavé, encore visible, qui le prolonge et va en haut du bois vers la sortie nord. Là-haut, deux pavillons (aujourd’hui maisons particulières) encadrent encore cet accès direct vers Paris.
Devant le château, par une nouvelle intervention de François Mansart, une vaste esplanade voit le jour, bornée de quatre grands pavillons, dont l’un d’eux subsiste, et deux petits.
Constance de Rohan, comtesse de Brionne, apporte une renaissance salutaire suite à la succession sans entretien des Lamoignon. Le délabrement de l’aile ouest (la façade entre les tours gothiques rondes) ne lui permet malheureusement pas de la conserver. Disparaît avec elle la belle salle de bal, ses boiseries et sa toiture de Philibert de l’Orme.
Elle ne la reconstruit pas pour faire bénéficier à la cour intérieure de l’apport notoire de lumière ainsi provoqué. La demeure arbore une nouvelle allure.
Le reste de la rénovation poursuivra la même ambition de luxe que précédemment. Le lustre retrouvé accueille de nombreuses fêtes au château, données par la comtesse. Le Parc est entièrement refait, cette fois à l’anglaise, par Jean-Marie Morel (architecte des parcs d’Ermenonville et la Malmaison notamment).
La fin de l’histoire est celle de tant de richesses de l’ancien régime. Il est déclaré bien national le 26 avril 1792 du fait du non retour d’émigration de la comtesse. La vente des pièces commença un an plus tard. A vil prix le mobilier part, chiffonniers, coiffeuses et commodes attirent moins que ce qui est proprement utilitaire. Après quelques prélèvements d’éléments pour les collections d’état, le bâtiment fut adjugé à un revendeur de matériaux en 1796. Les héritiers renoncent en 1797 à la restitution de ce qui est désormais une ruine. Les derniers murs sont arasés en 1835.
Le château de Limours vu du nord est
Les vestiges du domaine font l’objet d’une promenade thématique.